mercredi 8 octobre 2014

El Murid décrypte Loukachenko

Alexandre Loukachenko, le "renard de Bielorussie"
(NB : Suite aux réactions de fidèles lecteurs ne comprenant pas la publication de certains articles récents, particulièrement les traductions de Strelkov et El Murid, je me vois dans l'obligation de rappeler une chose importante : Cet article représente uniquement l'opinion de son auteur et en aucun cas mon opinion personnelle, je le publie ici pour son caractère informatif, étant donné qu'El Murid représente une tendance importante de l'opinion russe conservatrice, et qu'il est un des blogueurs les plus lus en Russie. J'essaie à travers mon suivi de la situation en Ukraine/Novorossia de présenter au public francophone qui me lit un angle de vue différent sur ce conflit de celui proposé dans les médias. Cela ne veut pas dire que j'adhère systématiquement aux billets d'opinions que je publie ici.)

Anatoly El Murid (*) donne son analyse de l'interview du président biélorusse Loukachenko à la chaine officielle euro-atlantiste "Euronews" (vidéo en fin d'article) :

L'irritation de Loukachenko et sa position catégorique ne sont pas les produits d'une réaction épidermique, mais d'une réflexion profondément mûrie.

Les événements d'Ukraine vont bon train depuis quasi une année déjà, sept mois depuis la victoire des nazis, cinq mois d'opération punitive, six mois depuis l'union retrouvée avec la Crimée. Dès lors, Loukachenko ne se laisse pas emporter par l'émotion, ce qu'il dit est mûrement pensé, équilibré.
La Russie a rétabli l'union avec la Crimée, mais n'a pas mené le travail jusqu'au bout. Elle n'a pas fait admettre l'événement par l'Ukraine, laissant la porte ouverte à une mise en question de ce retour. La Russie a garanti la protection des habitants du Donbass, déclarant se réserver le droit d'intervention en cas d'opération punitive. Le Donbass est détruit, des millions d'habitants ont fui, des dizaines de milliers ont été tués. Aucune intervention directe ne s'en est suivie. L'armée russe n'est pas sortie de sa position, derrière les femmes et les enfants. La Russie a misé sur le territoire limité de l'insurrection, sur des bandits avoués, elle en récolte un effondrement de la direction de l'opération et une catastrophe permanente. Le Président de la Russie s'est éloigné du déroulement des événements, apparaissant épisodiquement pour avancer des initiatives qui suscitent l'interrogation quant à leurs conséquences. Dans de telles circonstances, ce sont des fonctionnaires de troisième rang qui tirent les ficelles et ne font qu'aggraver la situation. Quant aux sanctions, il semble qu'elles n'en soient qu'à leur début.

Loukachenko s'est déjà exprimé auparavant à propos de la situation en Ukraine, pas de façon très positive, mais avec retenue. Le nouvel entretien se fait tranchant, peu amical. Mais il a entièrement raison. Le retournement de situation est tel qu'en Russie, les questions géopolitiques ont cessé d'être la prérogative du Président, pour devenir un champ accueillant les ébats frauduleux des bestioles du musée de cire du Kremlin et de la Maison Blanche. Loukachenko n'a aucune intention de traiter à leur niveau. Il a donc remisé les politesses.
Il est malaisé d'affirmer que Loukachenko ait, ou non, pu aborder ces thèmes en tête à tête, mais la cruauté de son évaluation semble relever de son désespoir de ne pouvoir faire part à Poutine de sa vision de la situation. C'est sans doute de ce point de vue que l'interview prend tout son sens.

Les déclarations selon lesquelles Loukachenko trahit la Russie vont bon train. Il est Président du Belarus et il promeut évidemment les intérêts de son pays. Toutefois ses propos empreints d'irritation ne recèlent aucune forme de trahison. La Russie elle-même mène sa propre politique, mais de façon tellement médiocre et inconséquente que ce n'est pas Loukachenko qu'il convient d'accuser de trahison, mais ceux qui se promènent négligemment en Novorossie et en Ukraine. Pourquoi leur permet-on d'y folâtrer ? C'est une autre question, sérieuse. Au cours de notre histoire, nous avons déjà eu affaire à de vils escrocs du genre de Bezobrazov, qui sut comment tirer profit de la cupidité des élites et du détachement total du monarque pour pousser les choses jusqu'à la guerre russo-japonaise, perdue avec fracas par la Russie, qui récolta en outre la révolte de 1905. La Russie parcourt le champ de l'histoire avec un rateau, et avec zèle, « elle n'en rate pas une ».

Lorsqu'on reproche à Igor Strelkov sa tendance maniaque à vouloir faire comprendre à Poutine que ses fonctionnaires conduisent le pays à la catastrophe avec la pleine approbation du président, on oublie qu'il est historien, et de plus, spécialisé dans les dernières années de l'Empire de Russie. Il comprend parfaitement se qui se passe, mais il n'a pas la possibilité de résoudre le problème comme il a pu, à Slaviansk, résoudre le problème des pillards et des criminels.

Dans notre cas, les commentaires de Loukachenko sont du même ordre. Il n'est pas en mesure de faire comprendre cette même réalité à Poutine, autrement qu'à travers une évaluation tranchante des lamentables échecs de l'année écoulée.



L'interview complète de Loukachenko (Trad. Euronews)

(*) Anatoly E. Nesmiyan : blogueur russe de Saint-Pétersbourg, plus connu par son surnom à savoir el_murid (El mouride). En 2011, l'Institut biographique russe l'a nommé «blogueur de l'année» et lui a attribué le "Prix national de la blogosphère" pour sa "contribution au développement de la société civile". Darya Mitina, une ancienne député de la Douma, classée très à gauche sur l'échiquier politique russe, a dit qu' El mouride était le blogueur le plus lu du pays, cité par tous les grands médias en Russie et même à l'étranger, qui s'est fait connaître notamment à travers ses analyses de la guerre en Libye, et sa lutte contre les "bacchanales de l' information".

4 commentaires:

  1. oui El Mouride a reçu le prix national de la blogosphère et Obama celui du prix nobel de la paix... quand à la Gauche en Russie, il n'est un secret pour personne que l'opposition communiste (qui n'a sans doute pas fait assez de dégâts à ce pays) rêve de renverser Poutine.

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  2. Quand à Poutine de quel droit se serait il ingéré dans les affaires ukrainiennes.. il ne peut pas reprocher aux mondialistes le viol des lois internationales et faire la même chose. Seule l'Ukraine pouvait demander son aide.. Si l'Ukraine tue son peuple, Poutine n'y peut rien malheureusement, si ce n'est apporter de l'aide humanitaire et ouvrir ses frontières. Il l'a fait !

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  3. "en temps de guerre, contester le commandant en chef relève de la trahison" (strelkov)

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  4. que vienne foutre les usa à 15 000 kms de leurs frontières en ukraine sinon foutre la merde comme d'hab; pour les russes c'est leur sécurité qui est menacée.

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